Monday, September 26, 2022
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Chantage à Saint-Étienne : les secrets and techniques d’une démission


Le changement de pied a pris tout le monde de court docket. Juste après avoir affirmé jeudi 22 septembre, dans une interview au Progrès, qu’il ne comptait pas quitter ses fonctions d’adjoint à l’éducation de la ville de Saint-Étienne, Samy Kéfi-Jérôme a pris la décision inverse, dès le lendemain, en présentant sa démission de ses mandats de conseiller municipal et métropolitain à la préfète de la Loire.

Dans un communiqué de presse relayé par la presse locale vendredi 23 septembre, à 13 heures, l’élu native de 42 ans a « déploré aujourd’hui les attaques personnelles dont [il fait] l’objet » et « constaté que les circumstances d’exercice de [ses] fonctions ne sont plus réunies ».

Le contexte de ce revirement éclair ? Mediapart avait pris attache avec Me Mathias Chichportich, l’un des avocats de Samy Kéfi-Jérôme, quelques heures avant l’annonce de sa démission, dans le cadre de la publication à venir de nouvelles informations, particulièrement compromettantes, le concernant.

Ces éléments se fondent sur un enregistrement sonore, dont Mediapart diffuse des extraits (à écouter ci-dessous), d’une dialog, en octobre 2016, entre Samy Kéfi-Jérôme et Gilles Artigues, l’adjoint qu’il a filmé à son insu dans une chambre d’hôtel après leur victoire commune aux municipales de 2014.

Samy Kéfi-Jérôme est impliqué dans l’affaire du chantage contre Gilles Artigues. © Photograph illustration Sebastien Calvet / Mediapart avec REA et MaxPPP

Le movie a été tourné le 5 janvier 2015, à la faveur d’un déplacement de Samy Kéfi-Jérôme et Gilles Artigues pour une réunion d’élus à Paris. Auprès de Mediapart, Gilles Rossary-Lenglet, ancien conjoint de Samy Kéfi-Jérôme, a raconté remark il avait, avec son ex-compagnon, décidé d’organiser une soirée avec un escort boy dans le however le filmer en compagnie de Gilles Artigues, père de famille aux valeurs catholiques conservatrices.

Un montage basé sur des extraits de la vidéo, portant le titre « In mattress with Gilles Artigues », a ensuite été montré, en octobre 2016, par Samy Kéfi-Jérôme à la victime de ce kompromat dans le however de le faire chanter politiquement, ainsi que l’a raconté Gilles Artigues aux enquêteurs de la police judiciaire de Lyon.

L’enjeu : que le centriste Artigues ne s’émancipe pas de la majorité municipale du maire Les Républicains (LR) Gaël Perdriau et soutienne une éventuelle candidature aux législatives de 2017 de Samy Kéfi-Jérôme. Ce dernier reprochait à l’époque à Gilles Artigues, avec lequel il militait au sein du MoDem, de ne pas lui laisser assez de place aux élections.

Dans la dialog enregistrée, qui se déroule quelques jours après la révélation de la vidéo à Gilles Artigues, ce dernier se montre scandalisé par le procédé utilisé. 

« Vous m’avez tendu un piège pour ressortir ça un an et demi après, vous vous rendez compte ? », s’indigne la victime.

Ce à quoi Samy Kéfi-Jérôme répond : « Mais parce que un an et demi après vous continuez à me baiser. »

Gilles Artigues poursuit ensuite : « Je n’ai pas peur, je n’ai pas peur de ces pictures. »

Samy Kéfi-Jérôme lui rétorque alors : « Je ne vous ai pas demandé de disparaître, je vous ai proposé un contrat. »

Questionnés sur la teneur de cette dialog, Mes Sofia Bougrine et Mathias Chichportich, avocats de Samy Kéfi-Jérôme, ont estimé que les échanges sont « parfaitement cohérents avec les déclarations effectuées par [leur] shopper devant les providers d’enquête ».

Les avocats ont également transmis un message que Samy Kéfi-Jérôme aurait envoyé à Gilles Artigues après cette dialogue enregistrée, et dans lequel il répète qu’il n’a pas voulu le faire chanter (lire en annexes).

Par la voix de ses avocats, l’élu démissionnaire « affirme donc clairement n’avoir jamais exigé quoi que ce soit concernant la carrière et les ambitions de Gilles Artigues » et « maintient que lors de cette soirée [dans la chambre d’hôtel] son intention n’était ni politique, ni financière ».

Dialog entre Samy Kéfi-Jérôme et Gilles Artigues en octobre 2016.

L’échange enregistré précède deux autres conversations, également révélées par Mediapart, entre Gilles Artigues et le tandem composé du maire Gaël Perdriau et de son puissant directeur de cupboard Pierre Gauttieri. Dans ces discussions, qui se sont déroulées en 2017 et 2018 à l’hôtel de ville, Gaël Perdriau et son bras droit ont directement menacé leur adjoint en des termes d’une uncommon violence (à écouter ici).

La démission de Samy Kéfi-Jérôme, qui avait immédiatement été suspendu de ses fonctions de conseiller régional délégué (qu’il cumulait avec son poste d’adjoint) au début de l’affaire, fragilise un peu plus Gaël Perdriau juste avant la tenue d’un conseil municipal explosif – le premier depuis le début de l’affaire – lundi 26 septembre.

Pour tenter de calmer les esprits, le maire de Saint-Étienne avait déjà fini par accepter de limoger, mardi 20 septembre, son fidèle directeur de cupboard Pierre Gauttieri, comme le réclamaient de nombreux élus de son propre camp à la mairie comme à la métropole.

Gaël Perdriau a également annoncé, jeudi 22 septembre, sa volonté de se mettre « en retrait » – sans toutefois démissionner, à ce stade – de ses « fonctions de représentations extérieures » exercées dans le cadre de ses deux mandats de président de la métropole et de maire.

Avec le départ de son adjoint à l’éducation, le voilà désormais, quatre semaines après le déclenchement de l’affaire, seul en première ligne, sans levier ni fusible supplémentaires.

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